Ce jour là, avec toi ma jolie Capucine
Comme le destin qui, doucement, se dessine,
Nous nous sommes rencontrées, sur cette colline.
Te souviens-tu ? La où la brise est orpheline,
Où le temps semble s'arrêter chaque seconde,
Cet endroit que chaque été la rivière inonde,
Tu sais, là où passaient les joyeux chiens de chasse,
C'est là que tout les sentiments s'effacent.
La colline aux coquelicots, te souviens tu ?
Mon amie, chaque fois, je voie, et j'imagine
Dans ces coquelicots, ce rouge capucine.
Celui du foulard que tu portais au poignet,
Lui, qui allait si bien avec ta robe craie.
Mais ces fleurs, ces beautés écarlates, notre fleur,
Est la dernière que tu as touché, ici.
Capucine, ne t'inquiètes pas, oui, n'aies pas peur,
Je viens tout les jours, voir la joie de ta vie
Ton cœur, ton joyaux, ton âme, je la chérie tant
En souvenir de ton sourire, que j'aimais tant.
Je t'aime, mon cher coquelicot capucine.

Des cris. Des pleurs. Des voix qui se brisent. Des mots remplis de haine. Des coeurs privés de tendresse.
Un vacarme assourdissant. Une scène insupportable... Et pourtant familière.
Chaque jour ressemble à celui-ci. Il n'y a plus de place pour l'amour. Seules la colère et la haine dominent.
On a troqué notre oxygène contre des injures. On ne peut plus vivre sans vulgarité, sans violence, sans agressivité.

Noémie regarde ce massacre sans comprendre son intérêt. Effrayée, elle guette la mort. L'enfer n'est sûrement pas loin. Sa famille se dispute sur des sujets futiles, et elle ne sait pas comment les arrêter.

C'est dans cette atmosphère que Noémie est née. C'est ici qu'elle a grandi. Parfois, elle sent que la haine s'empare de son âme, alors elle ne parvient plus à contrôler son agressivité. Elle a peur. Peur de devenir aussi monstrueuse que cette famille, sa famille, celle qui lui offre chaque jour ce magnifique spectacle atroce.

« Un jour, ou plutôt une nuit, il était cinq heures du matin. Je me suis mise à hurler, hurler comme je ne l'avais jamais fait, parce que je pensais que mon père avait tranché ma mère et mon frère avec une hache », nous confie la jeune fille avant d'éclater en sanglots. Un traumatisme qui la marquera jusqu'à la fin de son existence.

Du sang. Le champ de vision de Noémie est taché de sang. Elle ne voit rien d'autre qu'un monde ensanglanté, dénué de toute innocence et de toute forme d'amour.

Mais, quelquefois, Noémie ferme les yeux, espérant découvrir un monde paisible lorsqu'elle les rouvrira.

« Il y a un coquelicot », nous souffle-t-elle doucement.

« Un coquelicot. Rouge comme du sang, rond comme la Terre... Et lorsque j'ouvre les yeux, tout me paraît si calme. Comme si Morphée était passé, déposant en chacun un coquelicot au pouvoir apaisant. Un coquelicot, aussi léger qu'un rêve. C'est le symbole de Morphée, la preuve de son passage. »



Quelques années plus tard, il semblerait que la jeune Noémie ait été retrouvée morte, un coquelicot sur le coeur. Vivre dans un monde si brutal lui causait de la souffrance.
Morphée serait donc venu la libérer... Il l'aurait plongée doucement dans un sommeil éternel... Pour qu'à jamais son âme repose en paix.